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Éditorial sur les prisons vaudoises

De fausses économies

Les autorités n’hésitent pas à investir dans la sécurité des prisons, moins dans les soins offerts aux détenus. Un choix illogique du point de vue sécuritaire.

Dominique Botti
Publié aujourd’hui à 06h35

Le manque de suivi psy dans les prisons est un serpent de mer depuis l’entrée en vigueur de notre Code pénal en 1942. Pendant longtemps, cette question n’était tout simplement pas à l’ordre du jour de nos autorités: les fous étaient dans des hôpitaux psychiatriques et les détenus devaient purger, en silence, leur peine dans un pénitencier. Avec le temps, ces deux univers se sont rapprochés, puis mélangés. À la fin des années 90, les autorités prennent conscience que de plus en plus de condamnés souffrent de troubles psychiques.


Dans le canton de Vaud, le Conseil d’État tente de répondre à ce nouveau défi avec une première. initiative: le projet Super-Bochuz. Jugé onéreux par la droite du Grand Conseil qui tue dans l’œuf en 1997 cette construction estimée à 126 millions de francs. Six ans plus tard, 60% de Payernois refusent la construction d’un EMS sécurisé qui coûterait, lui aussi, trop cher. Enfin, en 2016, la conseillère d’État Béatrice Métraux abandonnait l’idée d’un hôpital carcéral à Bochuz – promis par son homologue Philippe Leuba – pour des questions budgétaires.


«Les détenus malades ne guérissent pas. Et un séjour derrière les barreaux peut même empirer leur état.»


Cet établissement spécialisé – pourtant attendu comme le messie par les professionnels de la santé pénitentiaire – n’existe toujours pas en 2023. Certes, les autorités font des efforts pour offrir un soutien médical digne de ce nom. Mais le manque de moyens limite la marge de manœuvre et ne résout pas le problème de fond. Les détenus malades ne guérissent pas. Et un séjour derrière les barreaux peut même empirer leur état, voire provoquer des troubles chez les sains d’esprits. C’est un cercle vicieux.


La solution est bien évidemment financière. La prison coûte cher (400 francs par jour pour un détenu). Un hôpital carcéral coûte encore plus cher (plus de 1300 francs par jour). Certains politiciens pensent sauver leur budget en se sucrant sur le dos de la psychiatrie carcérale. C’est une fausse économie. Plus vite un prisonnier sera guéri, plus vite il sera libéré, moins il coûtera à la société et moins il récidivera. L’investissement dans les soins permet ainsi de soulager les prisons et de renforcer la sécurité publique. Au final, c’est toute la collectivité qui en bénéficie. La balle est désormais dans le camp des ministres chargés des Prisons et de la Santé, Vassilis Venizelos et Rebecca Ruiz.

Dominique Botti est journaliste à la rubrique vaudoise de 24 Heures, spécialisé dans les enquêtes de terrain, les faits divers et l’actualité judiciaire. Plus d’infos @dominiquebotti

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Éditorial sur les prisons vaudoises

De fausses économies

Les autorités n’hésitent pas à investir dans la sécurité des prisons, moins dans les soins offerts aux détenus. Un choix illogique du point de vue sécuritaire.

Dominique Botti
Publié aujourd’hui à 06h35

Le manque de suivi psy dans les prisons est un serpent de mer depuis l’entrée en vigueur de notre Code pénal en 1942. Pendant longtemps, cette question n’était tout simplement pas à l’ordre du jour de nos autorités: les fous étaient dans des hôpitaux psychiatriques et les détenus devaient purger, en silence, leur peine dans un pénitencier. Avec le temps, ces deux univers se sont rapprochés, puis mélangés. À la fin des années 90, les autorités prennent conscience que de plus en plus de condamnés souffrent de troubles psychiques.


Dans le canton de Vaud, le Conseil d’État tente de répondre à ce nouveau défi avec une première. initiative: le projet Super-Bochuz. Jugé onéreux par la droite du Grand Conseil qui tue dans l’œuf en 1997 cette construction estimée à 126 millions de francs. Six ans plus tard, 60% de Payernois refusent la construction d’un EMS sécurisé qui coûterait, lui aussi, trop cher. Enfin, en 2016, la conseillère d’État Béatrice Métraux abandonnait l’idée d’un hôpital carcéral à Bochuz – promis par son homologue Philippe Leuba – pour des questions budgétaires.


«Les détenus malades ne guérissent pas. Et un séjour derrière les barreaux peut même empirer leur état.»


Cet établissement spécialisé – pourtant attendu comme le messie par les professionnels de la santé pénitentiaire – n’existe toujours pas en 2023. Certes, les autorités font des efforts pour offrir un soutien médical digne de ce nom. Mais le manque de moyens limite la marge de manœuvre et ne résout pas le problème de fond. Les détenus malades ne guérissent pas. Et un séjour derrière les barreaux peut même empirer leur état, voire provoquer des troubles chez les sains d’esprits. C’est un cercle vicieux.


La solution est bien évidemment financière. La prison coûte cher (400 francs par jour pour un détenu). Un hôpital carcéral coûte encore plus cher (plus de 1300 francs par jour). Certains politiciens pensent sauver leur budget en se sucrant sur le dos de la psychiatrie carcérale. C’est une fausse économie. Plus vite un prisonnier sera guéri, plus vite il sera libéré, moins il coûtera à la société et moins il récidivera. L’investissement dans les soins permet ainsi de soulager les prisons et de renforcer la sécurité publique. Au final, c’est toute la collectivité qui en bénéficie. La balle est désormais dans le camp des ministres chargés des Prisons et de la Santé, Vassilis Venizelos et Rebecca Ruiz.

Dominique Botti est journaliste à la rubrique vaudoise de 24 Heures, spécialisé dans les enquêtes de terrain, les faits divers et l’actualité judiciaire. Plus d’infos @dominiquebotti

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