nouvelles-collectif59-3-juillet-2023

Nouvelles du 3 juillet 2023 – Prison et santé mentale : pour l’Affaire Christian, une victoire d’étape !

La prison n’étant pas un lieu de soins, l’Action Maladie Psychique et Prison (AMPP) se bat pour que les personnes atteintes de troubles mentaux aient accès aux soins dont ils ont besoin et soient placées dans des institutions spécifiques.

Le Collectif 59 est l’un des volets de l’AMPP. Créé en août 2021, ce Collectif a pour but de dévoiler à un plus large public, les conditions réelles d’exécution en prison d’une mesure thérapeutique, vécues par des patients détenus où la logique carcérale l’emporte largement sur la logique thérapeutique.

Le Collectif 59 est aussi un mouvement d’entraide et de soutien à la lutte des proches pour de meilleures conditions de soins pour «leur» patient-détenu. Ensemble, ils veulent agir concrètement afin que la Suisse romande se dote enfin d’institutions de soins en santé mentale dignes de ce nom.

En un premier temps, Christian*,  accompagné de ses proches s’est engagé activement pour témoigner de son parcours carcéral. Puis Raphaël* et ses proches sortent aussi de l’ombre et viennent renforcer notre équipe.

Christian* et Raphaël* = prénoms d’emprunt

Nouvelles du 3 juillet 2023 – Prison et santé mentale : pour l’Affaire Christianune victoire d’étape !

Aux personnes intéressées et/ou concernées par les activités et thématiques du Graap-Association,

À nos partenaires psychosociaux et politiques,

À vous qui soutenez le Collectif 59,

Madame, Monsieur, Chère et Cher Ami-e,

Votre intérêt et vos réactions suite à nos Nouvelles du 1er juin nous ont réjouis. Depuis cette date, le 15 juin, nous avons eu le plaisir de rencontrer quelques-uns parmi vous à l’occasion du 12ème Café Prison. À nouveau, la salle des fêtes du Casino de Montbenon a fait salle comble, les 130 chaises installées étaient quasiment toutes occupées.

Affaire Raphaël*, toujours détenu, un patient qui patiente courageusement

Nous sommes toujours dans l’attente de la réponse de la COP (Commission vaudoise des plaintes des patients) à la dénonciation que les parents avaient déposées en automne dernier. L’état psychique et somatique de ce patient-détenu en prison continue à se détériorer de manière préoccupante. Le 25 avril 2023, une rencontre extraordinaire a réuni les intervenants chargés du suivi de ce patient-détenu, le médecin chef du Service vaudois de médecine et de psychiatrie pénitentiaire (SMPP), l’adjoint au médecin Chef de la section de psychiatrie du développement mental (SPDM) ainsi que les parents. A cette occasion, plusieurs pistes en lien avec les traitements nécessaires à la santé de Raphaël ont été évoquées, y compris l’urgence de certaines interventions. A ce jour, rien n’a bougé. Et ce, malgré des propositions concrètes du SPDM.

Affaire Christian* : Il est LIBRE, il est sorti de prison !

Eh bien oui, c’est bien vrai, il est libre ! Plus de menottes et d’entraves, les barreaux aux fenêtres et l’uniforme orange (couleur du vêtement-signature de son statut de prisonnier), finie la crainte du cachot au cas où il fait faux. Le courrier contrôlé, les contacts avec les proches réglementés et restreints. Tout ça et plus encore, depuis le mercredi 5 avril 2023, c’est  F I N I.

Bref rappel des faits

Au tout début du mois de mai 2020, Christian, en pleine décompensation psychotique suite à un arrêt de la médication, commet un simple délit (une bagarre avec un ami d’enfance). Il est arrêté et incarcéré. Malgré un casier judiciaire vierge, il écope de 12 mois de prison ferme. Comme au moment du délit il était en pleine crise de délire, sa responsabilité pénale a été jugée diminuée. La présence du diagnostic de schizophrénie lui a valu la condamnation à exécuter une mesure thérapeutique institutionnelle. Le canton de Vaud n’ayant pas d’établissement répondant aux critères d’une mesure de l’article 59 al.3 du Code pénal (exécution en milieu fermé) Christian a été contraint de suivre cette mesure en prison.

Durant les 18 mois de sa détention préventive, il sera la plupart du temps en isolement 23h sur 24h. Une fois même, jusqu’à 30 jours d’affilée au cachot de la prison du Bois Mermet. Alors qu’il est toujours en décompensation et sans soins adaptés. Cette détention cellulaire contrevient au No 45 des Règles Nelson Mandela.

Les premiers mois en détention étaient tumultueux, sans soins véritables autres que des médicaments qu’il refusait pour la plupart du temps. Ce n’est qu’en novembre 2020, que Christian est enfin pris en charge dans l’unité hospitalière de Curabilis pendant 35 jours. Enfin une stabilisation commence à se faire jour. Au printemps 2021, il passera quatre mois dans l’unité psychiatrique de la Croisée où il demandera lui-même une médication neuroleptique sous injection dépôt. Cette formule lui convient bien et il n’a pas d’effets secondaires handicapants. Dès juin 2021, il ne fera plus jamais fait de rechutes, ni d’écart de comportement.

De la prison à l’air libre,  voici le bref déroulé chronologique

  • 23 fév. 2022 – Annonce d’examen de la libération conditionnelle

L’Office d’exécution des peines (OEP) lance le processus d’examen annuel pour une éventuelle libération conditionnelle.

  • 14 mars 2022 – Préavis de la curatrice 

Dans ce préavis à l’OEP, la curatrice relève que Christian est stable depuis plus qu’une année ; qu’il montre une compliance médicamenteuse sans faille ;  que l’injection dépôt mensuelle de neuroleptiques lui convient parfaitement ; Elle préavise pour le placement en foyer et un traitement psy ambulatoire.

  • 31 mars 2022 –  Préavis négatif de l’OEP

l’OEP adresse son préavis au Juge d’application des peines (JAP). Il propose de refuser la libération conditionnelle «largement prématurée» partant de « la gravité de ses troubles psychiatriques, sa fragilité psychique, un investissement dans le cadre de son suivi psychothérapeutique récent, tout comme sa compliance médicamenteuse, <…> et au vu du risque de récidive qu’il présente

  • L’OEP cite aussi le rapport du Service de médecine et de psychiatrie pénitentiaire (SMPP) – qui précise : «Le condamné se présente à tous ses rendez-vous et l’alliance thérapeutique est qualifiéde satisfaisante. »
    • À cet égard, la stabilité psychique dont il est fait état doit pouvoir être évaluée sur une période suffisamment longue avant d’entamer un processus de réflexion sur la suite de sa prise en charge < … comprenant > un régime de conduites (sorties à l’extérieurs accompagnées par 2 professionnels de la prison) lesquelles n’ont pas encore débutées
    • Et de conclure : «Ainsi, il convient de progresser prudemment dans l’ouverture du cadre de la mesure pénale et de lui laisser le temps nécessaire pour que lesdites ouvertures se passent dans les meilleurs conditions possibles.»
  • 05 mai 2022 – Audience au Tribunal 

Calme et positif, Christian a bien défendu sa cause. Prévenant un refus éventuel de libération conditionnelle, Me Gruber a obtenu la réalisation d’une expertise psychiatrique et elle adressera au Tribunal une vingtaine de questions  à poser à l’expert concernant l’évolution de Christian quant au risque de récidive, au diagnostic, au traitement, au suivi thérapeutique. Et nous sommes reconnaissants, toutes ces questions ont été transmises à l’expert.

  • 20 septembre 2022 – Rapport d’expertise positif

Le rapport de l’expert psychiatre ne laisse planer aucun doute : au vu de l’évolution très favorable de Christian, il préconise un traitement ambulatoire et le placement en foyer spécialisé.

  • De septembre 2022 à février 2023 – Le temps de l’évaluation

C’est le temps de multiples échanges, de préavis, de déterminations, de rapports. CIC (Commission de dangerosité), criminologue, OEP, procureur, psychiatre sont sollicités.

Parallèlement, des sorties sont organisées. Et finalement la décision de l’OEP tombe : Christian peut bénéficier d’un élargissement du cadre. De l’exécution de la mesure thérapeutique en milieu fermé selon l’alinéa 3 de l’article 59 du Code pénal, Christian pourra passer à l’al. 2 du même article, c’est-à-dire l’étape où il sera placé dans un foyer reconnu par le Service pénitentiaire. Ce placement est prévu pour le printemps, si tout se passe bien.

  • Troisième Noël en prison !    … pour l’exécution d’une mesure thérapeutique, la prison étant considérée comme service de santé publique  par les Tribunaux cantonal et fédéral.
  • 14 février 2023 – La JAP refuse la libération conditionnelle

C’était prévisible, bien qu’on s’y attendait, on espérait tout de même. La force de conviction de l’OEP par rapport aux risques de récidive l’a emportée.Les autorités n’appliquent-elles pas systématiquement la procédure des étapes de la mesure dite thérapeutique, sans examen attentif de l’évolution personnelle du patient-détenu ? Même le rapport positif du SMPP et surtout le constat très détaillé de l’expert, ne font pas le poids. 

Face à la Justice, les patients psychiques subiraient-ils une discrimination ? Ne devrait-on pas parler de présomption de violence qui pèse sur un détenu porteur d’un diagnostic psychiatrique ?

  • 24 février 2023 – Dépôt du recours au Tribunal cantonal, suite au refus de la libération conditionnelle

Le Collectif 59 du Graap décide de poursuivre la défense des intérêts de Christian et de ses proches et par là, tenter de sensibiliser nos autorités sur leur pratique qui mérite d’être questionnée. Dès lors, Christian, représenté par notre avocate Me K. Gruber, dépose un recours à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal. Nous sommes déterminés à aller jusqu’à Strasbourg, si nécessaire, sachant que nous pouvons compter avec vous qui êtes de plus en plus nombreux à monter dans notre bateau et ramer pour que les choses changent.

Notre argumentation porte essentiellement sur :

·         le principe de proportionnalité de la mesure qui exige que la mesure la moins incisive pour atteindre le même but, soit privilégiée,

·         le fait que ce refus de la libération conditionnelle s’écarte sans raison ni justification des conclusions de l’expert.

  • 15 mars 2023 – Décision de libération conditionnelle

On peut lire dans l’arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal entre autres :

« Compte tenu des conclusions de cette expertise, c’est de façon peu compréhensible que tant l’OEP, que le Ministère Public, que la CIC et enfin la JAP ont considéré que la libération conditionnelle était prématurée.» 

« Il convient de constater que le cadre carcéral n’apporte plus rien et qu’il peut même s’avérer contre-productif. »

« On relèvera enfin que la gravité des infractions commises a valu au recourant une condamnation à une peine de privation de liberté d’un an et qu’il aura été détenu depuis trois ans dans moins d’un mois, ce dont il y a lieu de tenir compte dans l’examen de la proportionnalité de la mesure. »

« En définitive, on discerne mal les motifs pour lesquels les intervenants se distancient tous des conclusions claires des rapports de l’expertise. »

C’est donc ce samedi 1er avril 2023 que la curatrice recevait par la poste, cette décision de libération conditionnelle ! 

Et c’est le 5 avril que Christian recouvrait la liberté. Liberté (conditionnelle) mais liberté tout de même !

Maintenant, Christian vit dans un foyer où il peut bénéficier, sur place, de la présence 24h/24 de professionnels de la santé mentale bienveillants. Un suivi psychiatrique stable, avec des thérapies de groupe et des thérapies spécifiques à ses besoins. Des soirées pop quiz, des fêtes, des sorties au lac, au cinéma, en ville sont organisées. Christian y participe avec plaisir. Aujourd’hui avec des résidents, il a fait une tourte à la crème. Christian reçoit son argent de poche chaque semaine et va au magasin, seul ou avec d’autres. Il peut voir sa famille quand il veut, fêter les anniversaires, son propre anniversaire avec sa famille et ses amis. Toutes ces relations si importantes pour le rétablissement de sa santé psychique sont à nouveau présentes ! Il peut sortir quand il veut et aller où il veut. Christian redécouvre avec une saveur particulière toutes ces petites choses qui font partie de la vie normale.

Dans ce contexte, basé sur la confiance, la réussite, la réalisation de soi, la mise en valeur de ses compétences, la variété des contacts sociaux, Christian a commencé à redécouvrir le plaisir de vivre. Il entame la reprise de la responsabilité de sa vie. Quoi de plus rassurant pour lui et pour ses proches, mais aussi en terme de sécurité publique ?

Alors merci

Merci de tout cœur pour votre soutien ! Sans vous, qui partagez notre vision d’une justice plus humaine envers les personnes détenues en prison alors qu’elles ont un diagnostic de graves troubles psychiatriques, d’autisme ou de handicap mental, elles seraient probablement encore en prison.  Car, c’est avec votre soutien et encouragement que Christian et son avocate, ont pu faire recours après recours. Avec votre aide, il a pu sortir après 3 ans et non pas 5 ans et 8 mois comme la moyenne des patients détenus.

C’est grâce à vous que cette étape a été atteinte.

Et, nous sommes convaincus qu’ensemble, nous franchirons d’autres étapes.

Nous vous souhaitons de bien profiter de ce bel été.

En vous remerciant de l’attention portée à ces Nouvelles, et avec nos cordiales salutations.

Pour le Graap-A ,Mme Dominique Hafner, Présidente

Pour lAction Maladie Psychique et Prison du Graap,

Karen Hafsett. Nye, Coordinatrice et Madeleine Pont, Resp. AMPP

nouvelles-collectif59-3-juillet-2023

Nouvelles du 3 juillet 2023 – Prison et santé mentale : pour l’Affaire Christian, une victoire d’étape !

La prison n’étant pas un lieu de soins, l’Action Maladie Psychique et Prison (AMPP) se bat pour que les personnes atteintes de troubles mentaux aient accès aux soins dont ils ont besoin et soient placées dans des institutions spécifiques.

Le Collectif 59 est l’un des volets de l’AMPP. Créé en août 2021, ce Collectif a pour but de dévoiler à un plus large public, les conditions réelles d’exécution en prison d’une mesure thérapeutique, vécues par des patients détenus où la logique carcérale l’emporte largement sur la logique thérapeutique.

Le Collectif 59 est aussi un mouvement d’entraide et de soutien à la lutte des proches pour de meilleures conditions de soins pour «leur» patient-détenu. Ensemble, ils veulent agir concrètement afin que la Suisse romande se dote enfin d’institutions de soins en santé mentale dignes de ce nom.

En un premier temps, Christian*,  accompagné de ses proches s’est engagé activement pour témoigner de son parcours carcéral. Puis Raphaël* et ses proches sortent aussi de l’ombre et viennent renforcer notre équipe.

Christian* et Raphaël* = prénoms d’emprunt

Nouvelles du 3 juillet 2023 – Prison et santé mentale : pour l’Affaire Christianune victoire d’étape !

Aux personnes intéressées et/ou concernées par les activités et thématiques du Graap-Association,

À nos partenaires psychosociaux et politiques,

À vous qui soutenez le Collectif 59,

Madame, Monsieur, Chère et Cher Ami-e,

Votre intérêt et vos réactions suite à nos Nouvelles du 1er juin nous ont réjouis. Depuis cette date, le 15 juin, nous avons eu le plaisir de rencontrer quelques-uns parmi vous à l’occasion du 12ème Café Prison. À nouveau, la salle des fêtes du Casino de Montbenon a fait salle comble, les 130 chaises installées étaient quasiment toutes occupées.

Affaire Raphaël*, toujours détenu, un patient qui patiente courageusement

Nous sommes toujours dans l’attente de la réponse de la COP (Commission vaudoise des plaintes des patients) à la dénonciation que les parents avaient déposées en automne dernier. L’état psychique et somatique de ce patient-détenu en prison continue à se détériorer de manière préoccupante. Le 25 avril 2023, une rencontre extraordinaire a réuni les intervenants chargés du suivi de ce patient-détenu, le médecin chef du Service vaudois de médecine et de psychiatrie pénitentiaire (SMPP), l’adjoint au médecin Chef de la section de psychiatrie du développement mental (SPDM) ainsi que les parents. A cette occasion, plusieurs pistes en lien avec les traitements nécessaires à la santé de Raphaël ont été évoquées, y compris l’urgence de certaines interventions. A ce jour, rien n’a bougé. Et ce, malgré des propositions concrètes du SPDM.

Affaire Christian* : Il est LIBRE, il est sorti de prison !

Eh bien oui, c’est bien vrai, il est libre ! Plus de menottes et d’entraves, les barreaux aux fenêtres et l’uniforme orange (couleur du vêtement-signature de son statut de prisonnier), finie la crainte du cachot au cas où il fait faux. Le courrier contrôlé, les contacts avec les proches réglementés et restreints. Tout ça et plus encore, depuis le mercredi 5 avril 2023, c’est  F I N I.

Bref rappel des faits

Au tout début du mois de mai 2020, Christian, en pleine décompensation psychotique suite à un arrêt de la médication, commet un simple délit (une bagarre avec un ami d’enfance). Il est arrêté et incarcéré. Malgré un casier judiciaire vierge, il écope de 12 mois de prison ferme. Comme au moment du délit il était en pleine crise de délire, sa responsabilité pénale a été jugée diminuée. La présence du diagnostic de schizophrénie lui a valu la condamnation à exécuter une mesure thérapeutique institutionnelle. Le canton de Vaud n’ayant pas d’établissement répondant aux critères d’une mesure de l’article 59 al.3 du Code pénal (exécution en milieu fermé) Christian a été contraint de suivre cette mesure en prison.

Durant les 18 mois de sa détention préventive, il sera la plupart du temps en isolement 23h sur 24h. Une fois même, jusqu’à 30 jours d’affilée au cachot de la prison du Bois Mermet. Alors qu’il est toujours en décompensation et sans soins adaptés. Cette détention cellulaire contrevient au No 45 des Règles Nelson Mandela.

Les premiers mois en détention étaient tumultueux, sans soins véritables autres que des médicaments qu’il refusait pour la plupart du temps. Ce n’est qu’en novembre 2020, que Christian est enfin pris en charge dans l’unité hospitalière de Curabilis pendant 35 jours. Enfin une stabilisation commence à se faire jour. Au printemps 2021, il passera quatre mois dans l’unité psychiatrique de la Croisée où il demandera lui-même une médication neuroleptique sous injection dépôt. Cette formule lui convient bien et il n’a pas d’effets secondaires handicapants. Dès juin 2021, il ne fera plus jamais fait de rechutes, ni d’écart de comportement.

De la prison à l’air libre,  voici le bref déroulé chronologique

  • 23 fév. 2022 – Annonce d’examen de la libération conditionnelle

L’Office d’exécution des peines (OEP) lance le processus d’examen annuel pour une éventuelle libération conditionnelle.

  • 14 mars 2022 – Préavis de la curatrice 

Dans ce préavis à l’OEP, la curatrice relève que Christian est stable depuis plus qu’une année ; qu’il montre une compliance médicamenteuse sans faille ;  que l’injection dépôt mensuelle de neuroleptiques lui convient parfaitement ; Elle préavise pour le placement en foyer et un traitement psy ambulatoire.

  • 31 mars 2022 –  Préavis négatif de l’OEP

l’OEP adresse son préavis au Juge d’application des peines (JAP). Il propose de refuser la libération conditionnelle «largement prématurée» partant de « la gravité de ses troubles psychiatriques, sa fragilité psychique, un investissement dans le cadre de son suivi psychothérapeutique récent, tout comme sa compliance médicamenteuse, <…> et au vu du risque de récidive qu’il présente

  • L’OEP cite aussi le rapport du Service de médecine et de psychiatrie pénitentiaire (SMPP) – qui précise : «Le condamné se présente à tous ses rendez-vous et l’alliance thérapeutique est qualifiéde satisfaisante. »
    • À cet égard, la stabilité psychique dont il est fait état doit pouvoir être évaluée sur une période suffisamment longue avant d’entamer un processus de réflexion sur la suite de sa prise en charge < … comprenant > un régime de conduites (sorties à l’extérieurs accompagnées par 2 professionnels de la prison) lesquelles n’ont pas encore débutées
    • Et de conclure : «Ainsi, il convient de progresser prudemment dans l’ouverture du cadre de la mesure pénale et de lui laisser le temps nécessaire pour que lesdites ouvertures se passent dans les meilleurs conditions possibles.»
  • 05 mai 2022 – Audience au Tribunal 

Calme et positif, Christian a bien défendu sa cause. Prévenant un refus éventuel de libération conditionnelle, Me Gruber a obtenu la réalisation d’une expertise psychiatrique et elle adressera au Tribunal une vingtaine de questions  à poser à l’expert concernant l’évolution de Christian quant au risque de récidive, au diagnostic, au traitement, au suivi thérapeutique. Et nous sommes reconnaissants, toutes ces questions ont été transmises à l’expert.

  • 20 septembre 2022 – Rapport d’expertise positif

Le rapport de l’expert psychiatre ne laisse planer aucun doute : au vu de l’évolution très favorable de Christian, il préconise un traitement ambulatoire et le placement en foyer spécialisé.

  • De septembre 2022 à février 2023 – Le temps de l’évaluation

C’est le temps de multiples échanges, de préavis, de déterminations, de rapports. CIC (Commission de dangerosité), criminologue, OEP, procureur, psychiatre sont sollicités.

Parallèlement, des sorties sont organisées. Et finalement la décision de l’OEP tombe : Christian peut bénéficier d’un élargissement du cadre. De l’exécution de la mesure thérapeutique en milieu fermé selon l’alinéa 3 de l’article 59 du Code pénal, Christian pourra passer à l’al. 2 du même article, c’est-à-dire l’étape où il sera placé dans un foyer reconnu par le Service pénitentiaire. Ce placement est prévu pour le printemps, si tout se passe bien.

  • Troisième Noël en prison !    … pour l’exécution d’une mesure thérapeutique, la prison étant considérée comme service de santé publique  par les Tribunaux cantonal et fédéral.
  • 14 février 2023 – La JAP refuse la libération conditionnelle

C’était prévisible, bien qu’on s’y attendait, on espérait tout de même. La force de conviction de l’OEP par rapport aux risques de récidive l’a emportée.Les autorités n’appliquent-elles pas systématiquement la procédure des étapes de la mesure dite thérapeutique, sans examen attentif de l’évolution personnelle du patient-détenu ? Même le rapport positif du SMPP et surtout le constat très détaillé de l’expert, ne font pas le poids. 

Face à la Justice, les patients psychiques subiraient-ils une discrimination ? Ne devrait-on pas parler de présomption de violence qui pèse sur un détenu porteur d’un diagnostic psychiatrique ?

  • 24 février 2023 – Dépôt du recours au Tribunal cantonal, suite au refus de la libération conditionnelle

Le Collectif 59 du Graap décide de poursuivre la défense des intérêts de Christian et de ses proches et par là, tenter de sensibiliser nos autorités sur leur pratique qui mérite d’être questionnée. Dès lors, Christian, représenté par notre avocate Me K. Gruber, dépose un recours à la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal. Nous sommes déterminés à aller jusqu’à Strasbourg, si nécessaire, sachant que nous pouvons compter avec vous qui êtes de plus en plus nombreux à monter dans notre bateau et ramer pour que les choses changent.

Notre argumentation porte essentiellement sur :

·         le principe de proportionnalité de la mesure qui exige que la mesure la moins incisive pour atteindre le même but, soit privilégiée,

·         le fait que ce refus de la libération conditionnelle s’écarte sans raison ni justification des conclusions de l’expert.

  • 15 mars 2023 – Décision de libération conditionnelle

On peut lire dans l’arrêt de la Chambre des recours pénale du Tribunal cantonal entre autres :

« Compte tenu des conclusions de cette expertise, c’est de façon peu compréhensible que tant l’OEP, que le Ministère Public, que la CIC et enfin la JAP ont considéré que la libération conditionnelle était prématurée.» 

« Il convient de constater que le cadre carcéral n’apporte plus rien et qu’il peut même s’avérer contre-productif. »

« On relèvera enfin que la gravité des infractions commises a valu au recourant une condamnation à une peine de privation de liberté d’un an et qu’il aura été détenu depuis trois ans dans moins d’un mois, ce dont il y a lieu de tenir compte dans l’examen de la proportionnalité de la mesure. »

« En définitive, on discerne mal les motifs pour lesquels les intervenants se distancient tous des conclusions claires des rapports de l’expertise. »

C’est donc ce samedi 1er avril 2023 que la curatrice recevait par la poste, cette décision de libération conditionnelle ! 

Et c’est le 5 avril que Christian recouvrait la liberté. Liberté (conditionnelle) mais liberté tout de même !

Maintenant, Christian vit dans un foyer où il peut bénéficier, sur place, de la présence 24h/24 de professionnels de la santé mentale bienveillants. Un suivi psychiatrique stable, avec des thérapies de groupe et des thérapies spécifiques à ses besoins. Des soirées pop quiz, des fêtes, des sorties au lac, au cinéma, en ville sont organisées. Christian y participe avec plaisir. Aujourd’hui avec des résidents, il a fait une tourte à la crème. Christian reçoit son argent de poche chaque semaine et va au magasin, seul ou avec d’autres. Il peut voir sa famille quand il veut, fêter les anniversaires, son propre anniversaire avec sa famille et ses amis. Toutes ces relations si importantes pour le rétablissement de sa santé psychique sont à nouveau présentes ! Il peut sortir quand il veut et aller où il veut. Christian redécouvre avec une saveur particulière toutes ces petites choses qui font partie de la vie normale.

Dans ce contexte, basé sur la confiance, la réussite, la réalisation de soi, la mise en valeur de ses compétences, la variété des contacts sociaux, Christian a commencé à redécouvrir le plaisir de vivre. Il entame la reprise de la responsabilité de sa vie. Quoi de plus rassurant pour lui et pour ses proches, mais aussi en terme de sécurité publique ?

Alors merci

Merci de tout cœur pour votre soutien ! Sans vous, qui partagez notre vision d’une justice plus humaine envers les personnes détenues en prison alors qu’elles ont un diagnostic de graves troubles psychiatriques, d’autisme ou de handicap mental, elles seraient probablement encore en prison.  Car, c’est avec votre soutien et encouragement que Christian et son avocate, ont pu faire recours après recours. Avec votre aide, il a pu sortir après 3 ans et non pas 5 ans et 8 mois comme la moyenne des patients détenus.

C’est grâce à vous que cette étape a été atteinte.

Et, nous sommes convaincus qu’ensemble, nous franchirons d’autres étapes.

Nous vous souhaitons de bien profiter de ce bel été.

En vous remerciant de l’attention portée à ces Nouvelles, et avec nos cordiales salutations.

Pour le Graap-A ,Mme Dominique Hafner, Présidente

Pour lAction Maladie Psychique et Prison du Graap,

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