Hospitalisation réussie, isolement bénéfique

Hospitalisation «réussie» – Isolement «bénéfique»

 

J’ai été hospitalisée le 28 août 1997 à l’hôpital de Prangins suite à une grave tentative de suicide. J’ai dû réapprendre à parler et à marcher. Je suis donc arrivée à l’hôpital dans un état très sérieux. Le médecin de garde a décidé de me mettre en isolement. Cette salle n’était meublée que d’un matelas et d’une couverture. Ils m’ont enlevé mes habits, même le slip, de peur que je me fasse du mal.

Et je me suis retrouvée seule avec moi-même. Toutes les deux heures, les infirmiers arrivaient avec une injection. J’étais complètement k.-o. Le repas était servi dans des assiettes de plastique et, au début, je n’avais même pas droit à une cigarette. Cela a duré des semaines interminables.

Quant au suivi thérapeutique, il était quasi inexistant. Je voyais le médecin une fois par semaine. Absolument scandaleux! Ceci a duré presque deux mois et ne m’a rien apporté de positif. Ensuite, j’ai pu rejoindre les autres patients et je suis restée «cadre étage» pendant huit mois. Mais malheureusement, je n’étais pas en grande forme et j’ai à nouveau attenté à mes jours. On m’a d’abord transférée à l’hôpital de Nyon, puis, de retour à Prangins, le médecin m’a remise à l’isolement. Mais cette fois-ci, je n’y suis restée qu’une semaine et, aussi bizarre que cela puisse paraître, cela s’est avéré plutôt positif. Pourquoi?

Premièrement j’avais de quoi écrire et, pour moi qui ai besoin d’exercer cette activité, c’était déjà une bonne chose. De plus, j’avais des entretiens avec la doctoresse tous les jours, des conversations très profondes où j’ai pu réaliser beaucoup de choses. Bref, nous avons échangé avec un résultat constructif. Et chaque fois que je me retrouvais dans ma chambre fermée à double tour, je pouvais réfléchir, mettre sur papier tout ce dont nous avions parlé. Mais ma réflexion et ma prise de conscience n’auraient pas pu se faire si j’avais été assommée de médicaments. Je ne prenais que 4 demi-Leponex par jour alors qu’avant je prenais du Nozinan, du Temesta, du Tranxilium, du Fluenxol, etc. Alors, il est évident que je n’avais pas les idées claires avec toute cette chimie. Donc, cette semaine d’isolement fut assez enrichissante bien qu’il ne soit pas facile de se retrouver avec soi-même des heures et des heures. J’avais aussi le droit de lire les journaux. Je crois que de ma vie entière, je n’ai jamais lu le journal avec autant d’attention, autant dans les détails.

A l’isolement, on se sent en punition, le personnel s’énerve chaque fois que l’on sonne: «Ah! c’est encore vous!». Et parfois l’infirmière regarde par le «hublot» et l’on se sent une bête curieuse: c’est humiliant! Et je vous avoue que je ne garde aucun bon souvenir de mes passages à l’isolement, même du dernier. Aussi positif soit-il, j’ai beaucoup souffert de devoir faire face à moi-même, remettre en questions ma façon de penser, car finalement c’était ça le but de mon isolement: me retrouver et changer mon fonctionnement, ma façon de réagir aux événements.

Sur le moment c’était dur! Mais, par la suite, j’ai commencé à changer, à réfléchir avant d’agir, moins impulsive, à parler quand je sentais que j’allais me faire du mal ou autre. Tout a changé en moi et je sentais que j’intégrais au plus profond de moi un nouveau fonctionnement. Mais la souffrance reste là, bien présente. Seulement, la manière de l’approcher change. Parfois, il m’arrive de lire ce que j’ai écrit pendant ma période d’isolement. Cela me fait du bien. Les rechutes ne sont pas exclues pour autant.

Voilà, j’ai connu les deux facettes de l’isolement, de «la chambre de soins intensifs» comme on dit maintenant. C’est humiliant de se retrouver nue avec une chemise d’hôpital pour tout vêtement, de manger dans des assiettes en plastique, de faire pipi dans un vase, etc. Recevoir des injections de médicaments quatre ou cinq fois par jour, ne voir le médecin qu’une fois par semaine, je n’appelle pas ça des soins!

Mais un isolement non abusif qui se présente dans de bonnes conditions, ou les moins mauvaises possibles, peut être bénéfique.

 

V.P.

Hospitalisation réussie, isolement bénéfique

Hospitalisation «réussie» – Isolement «bénéfique»

 

J’ai été hospitalisée le 28 août 1997 à l’hôpital de Prangins suite à une grave tentative de suicide. J’ai dû réapprendre à parler et à marcher. Je suis donc arrivée à l’hôpital dans un état très sérieux. Le médecin de garde a décidé de me mettre en isolement. Cette salle n’était meublée que d’un matelas et d’une couverture. Ils m’ont enlevé mes habits, même le slip, de peur que je me fasse du mal.

Et je me suis retrouvée seule avec moi-même. Toutes les deux heures, les infirmiers arrivaient avec une injection. J’étais complètement k.-o. Le repas était servi dans des assiettes de plastique et, au début, je n’avais même pas droit à une cigarette. Cela a duré des semaines interminables.

Quant au suivi thérapeutique, il était quasi inexistant. Je voyais le médecin une fois par semaine. Absolument scandaleux! Ceci a duré presque deux mois et ne m’a rien apporté de positif. Ensuite, j’ai pu rejoindre les autres patients et je suis restée «cadre étage» pendant huit mois. Mais malheureusement, je n’étais pas en grande forme et j’ai à nouveau attenté à mes jours. On m’a d’abord transférée à l’hôpital de Nyon, puis, de retour à Prangins, le médecin m’a remise à l’isolement. Mais cette fois-ci, je n’y suis restée qu’une semaine et, aussi bizarre que cela puisse paraître, cela s’est avéré plutôt positif. Pourquoi?

Premièrement j’avais de quoi écrire et, pour moi qui ai besoin d’exercer cette activité, c’était déjà une bonne chose. De plus, j’avais des entretiens avec la doctoresse tous les jours, des conversations très profondes où j’ai pu réaliser beaucoup de choses. Bref, nous avons échangé avec un résultat constructif. Et chaque fois que je me retrouvais dans ma chambre fermée à double tour, je pouvais réfléchir, mettre sur papier tout ce dont nous avions parlé. Mais ma réflexion et ma prise de conscience n’auraient pas pu se faire si j’avais été assommée de médicaments. Je ne prenais que 4 demi-Leponex par jour alors qu’avant je prenais du Nozinan, du Temesta, du Tranxilium, du Fluenxol, etc. Alors, il est évident que je n’avais pas les idées claires avec toute cette chimie. Donc, cette semaine d’isolement fut assez enrichissante bien qu’il ne soit pas facile de se retrouver avec soi-même des heures et des heures. J’avais aussi le droit de lire les journaux. Je crois que de ma vie entière, je n’ai jamais lu le journal avec autant d’attention, autant dans les détails.

A l’isolement, on se sent en punition, le personnel s’énerve chaque fois que l’on sonne: «Ah! c’est encore vous!». Et parfois l’infirmière regarde par le «hublot» et l’on se sent une bête curieuse: c’est humiliant! Et je vous avoue que je ne garde aucun bon souvenir de mes passages à l’isolement, même du dernier. Aussi positif soit-il, j’ai beaucoup souffert de devoir faire face à moi-même, remettre en questions ma façon de penser, car finalement c’était ça le but de mon isolement: me retrouver et changer mon fonctionnement, ma façon de réagir aux événements.

Sur le moment c’était dur! Mais, par la suite, j’ai commencé à changer, à réfléchir avant d’agir, moins impulsive, à parler quand je sentais que j’allais me faire du mal ou autre. Tout a changé en moi et je sentais que j’intégrais au plus profond de moi un nouveau fonctionnement. Mais la souffrance reste là, bien présente. Seulement, la manière de l’approcher change. Parfois, il m’arrive de lire ce que j’ai écrit pendant ma période d’isolement. Cela me fait du bien. Les rechutes ne sont pas exclues pour autant.

Voilà, j’ai connu les deux facettes de l’isolement, de «la chambre de soins intensifs» comme on dit maintenant. C’est humiliant de se retrouver nue avec une chemise d’hôpital pour tout vêtement, de manger dans des assiettes en plastique, de faire pipi dans un vase, etc. Recevoir des injections de médicaments quatre ou cinq fois par jour, ne voir le médecin qu’une fois par semaine, je n’appelle pas ça des soins!

Mais un isolement non abusif qui se présente dans de bonnes conditions, ou les moins mauvaises possibles, peut être bénéfique.

 

V.P.

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24 avril 2024

Si vous avez personnellement vécu la contrainte en psychiatrie vous pouvez faire part de votre expérience sur la plateforme de l’Observatoire romand de la contrainte en psychiatrie (ORCEP). Ceci dans le but de constituer des savoirs issus...

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